Atlit mission: a XIIIth c. Frankish cemetery

Depuis 2015, une équipe franco-israélienne dirigée par Yves Gleize fouille le cimetière d’Atlit, avec le soutien de l’Israel Antiquity Authorities et du Hof-Hacarmel Regional Council. Le cimetière d’Atlit est le plus grand cimetière conservé de l’Orient latin. Il se situe à proximité du Château Pèlerin, édifice bâti entre 1217 et 1218 durant la cinquième croisade et confié à l’ordre des Templiers en 1220. Le cimetière d’Atlit présente, du fait de sa conservation et son étendue, les conditions idéales pour l’étude systématique d’un cimetière du Royaume franc de Jérusalem. Cet espace funéraire avait été désensablé puis restauré en 1934 sous le mandat britannique mais il n’avait jamais connu de réelles fouilles archéologiques. Depuis, il s’est fortement dégradé du fait de l’érosion et des tempêtes hivernales.

Voir le reportage CNRS images (2018) sur les fouilles d’Atlit.

Écouter l’émission « Carbone 14 » de France culture (2022) sur les fouilles d’Atlit.

Outre l’étude des pratiques funéraires, ce site exceptionnel permet de s’interroger sur son organisation et son recrutement. Le croisement des données archéologiques et anthropologiques permet d’analyser les transformations que le site a connues. La proximité du Château Pèlerin et les dalles observées (certaines monumentales) posent de nombreuses questions concernant l’identité des inhumés. Se posent également les questions suivantes : Quelle part de la population a eu accès au cimetière ? Quelle est la place des femmes et des enfants dans ce cimetière ? Des communautés distinctes y ont-elles été inhumées ? Toutes les tombes peuvent-elles être reliées à l’occupation chrétienne du site ?

Une expertise du site en 2014 et la réalisation de sondages ponctuels de 2015 à 2017 ont confirmé l’exceptionnel potentiel du site pour la connaissance des pratiques funéraires et l’organisation des espaces funéraires de l’Orient latin. En 2015, trois secteurs de fouille ont été choisis suivant les différences typologiques constatées et la densité des marqueurs de surface conservés ; six tombes ont été fouillées. En 2016 et 2017, les fouilles ont porté sur le Secteur 2, caractérisé par une grande diversité typologique et par de nombreux recoupements de tombes permettant d’apporter des éléments de chronologie relative. La découverte de nouvelles tombes non marquées et d’ossements en position secondaire a confirmé la très forte densité des inhumations. Les fouilles ont permis une meilleure compréhension des systèmes de fermeture des fosses, la mise au jour d’un cercueil cloué contenant les dépouilles de deux enfants décédés en bas âge, et la mise au jour d’une pointe métallique, vraisemblablement l’extrémité d’un bâton de pèlerin, associée à la dépouille d’une personne âgée inhumée en position de prière, les mains croisées sur la poitrine.

La fouille s’est poursuivie à partir de 2018 avec le soutien de la Commission des fouilles du ministère des Affaires étrangères, du Centre Français de Recherche à Jérusalem et du laboratoire PACEA à Bordeaux.  La campagne 2018 a permis de poursuivre la fouille du Secteur 2, caractérisé par la présence de tombes monumentales, de réaliser un relevé topographique, et de reprendre l’exploration du Secteur 1 où seules deux tombes avaient été fouillées en 2015. Les données archéo-anthropologiques ont permis une meilleure compréhension du Secteur 2, que cela soit concernant sa stratigraphie, la typologie des tombes et des pratiques funéraires ou son organisation. Ce secteur témoignerait d’un espace réservé pour un groupe particulier au sein du cimetière. La campagne 2019 s’est concentrée sur la poursuite de la fouille du Secteur 1. Elle a permis, sur 25 m², de préciser l’utilisation de l’espace funéraire. Si la mise en évidence de nombreux recoupements a permis de nuancer certaines hypothèses proposées jusqu’à maintenant, la découverte de mobilier (vaisselle, pendentif…) et l’identité biologique de certains défunts ont confirmé la distinction observée avec le Secteur 2. Un premier travail universitaire sur les pratiques funéraires du Secteur 1 a également été réalisé dans le cadre du mémoire de Master 2 de Chloé Lacourarie à l’université de Bordeaux. En 2020, du fait de la pandémie de Covid, la mission de terrain n’a pas eu lieu ; l’équipe s’est donc concentrée sur les études post-fouilles (relevés DAO des sépultures, rédaction du catalogue des sépultures, analyses ADN, datations radiocarbone…). La campagne de fouille 2021 a permis de terminer la fouille du Secteur 1 du cimetière. Malgré une équipe réduite à cause des restrictions sanitaires, une quarantaine de sépultures a pu être étudiée. Le substrat rocheux a été atteint, rendant désormais possible d’étudier des inhumations de différentes phases chronologiques du cimetière. On peut noter également la découverte des vestiges d’un cercueil cloué, le deuxième identifié depuis 2015. Enfin, de nouveaux vases d’origines chypriote et italienne ont été exhumés. En 2022, en l’absence de campagne sur le terrain, les études se sont concentrées sur les prélèvements réalisés. Un certain nombre d’analyses test (paléoparasitologie, xylologie, phytolithes, palynologie, métallurgie…) ont été mises en place pour vérifier leur faisabilité. Une analyse paléogénomique a été lancée sur des individus inhumés dans les Secteurs 1 et 2.

La mission 2023 porte sur l’ouverture et la fouille d’un nouveau secteur au nord-est, en périphérie du cimetière. Elle a notamment pour objectif la fouille d’une portion de la route médiévale longeant le site. Cette opération archéologique devrait permettre d’analyser les pratiques funéraires aux marges de l’espace funéraire et les liens stratigraphiques et topographiques entre la route menant au Château-Pèlerin et l’espace funéraire. La mission archéologique se poursuivra jusqu’en 2025. En parallèle avec la publication d’une première monographie (en préparation), la mission a pour objectif de travailler sur l’intégration du cimetière dans son environnement passé et présent.

 

Les principaux membres de la mission sont :

Yves Gleize, Inrap, laboratoire PACEA à l’université de Bordeaux. Spécialiste de la période médiévale, il participe à plusieurs missions et projets archéologiques en Éthiopie. Depuis 2015, il dirige la mission archéologique française sur le cimetière médiéval d’Atlit en Israël. Ses recherches, croisant données archéologiques et biologiques, portent sur les pratiques funéraires et les populations historiques dans les zones de marges et sur les contacts interculturels dans le bassin méditerranéen et dans la Corne de l’Afrique.

Elise Mercier, doctorante, université de Poitiers.

Chloé Lacourarie, archéo-anthropologue.

Simon Dorso, archéologue médiéviste.

Pierrick Tigreat, Service régional de l’archéologie d’Île-de-France.

Robert Kool, numismate, chef du département de numismatique à l’Israel Antiquities Authority.

Vardit Shotten-Hallel, architecte à l’Israel Antiquities Authority.

Joppe Gosker, spécialiste du mobilier métallique à l’Israel Antiquities Authority.

Marie-France Deguilloux, paléogénéticienne, université de Bordeaux, laboratoire PACEA

Bibliographie :

Gleize Y., Lacourarie C. Sous presse. ‘Atlit, Crusader Cemetery, Preliminary report. Hadashot Arkheologiyot.

 

Dorso S., Gleize Y., Mercier E. 2023. On the meaningfulness of small finds: two new mother of pearl cross pendants from Atlit and their wider context. In: Exploring Outremer. Studies in Medieval History in Honour of Adrian J. Boas.

Gleize Y. 2021. The Medieval Cemetery of ‘Atlit: Historiography and New Archaeological Data (2014-2019). In: Settlement and Crusade in the 13th Century: Multidisciplinary Studies of the Latin East. J., G. Fishhof, V. Shotten-Hallel. 124-138.

Gleize Y. 2020. Archaeothanatology, Burials and Cemeteries: perspectives for Crusader Archaeology. In: Crusading and Archaeology, Shotten-Hallel V. and Weetch R. (eds), 284-299.

Gleize Y., Dorso S. 2019. ‘Atlit, Crusader Cemetery, Preliminary report. Hadashot Arkheologiyot, 131.